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Bakhtine (1895-1975) et le dialogisme



Parce que la formation passe (presque) toujours par des énoncés et des textes, la pensée de M. Bakhtine peut nous aider à comprendre en quoi l'interlocution, l'intersubjectivité, le dialogue sont des composantes essentielles de ce qui constitue l'être humain, des processus par lesquels il se forme et se transforme.

Extraits de Todorov T. (1981) Mikhaïl Bakhtine, le principe dialogique… Seuil.

Les phrases entre guillemets sont des citations, celles en italiques sont attribuées à Bakhtine, les autres sont de Todorov (les N° de pages sont celles du livre de Tvetan Todorov qui donne les références d’origine pour les citations de Bakhtine ou d'auteurs appartenant au "cercle de Bakhtine", comme V. Volochinov ou P. Medvedev *).

Bakhtine (1895-1975) y est présenté comme l’un des plus grands théoriciens de la littérature, et plus généralement du texte, au sens large : tout discours, toute parole, tout énoncé humain, « comme produit de l’interaction entre la langue et le contexte d’énonciation – contexte qui appartient à l’histoire » (p.8).

« l’énoncé n’est pas individuel… le caractère le plus important de l’énoncé est son dialogisme, c’est à dire sa dimension intertextuelle… » (p.8).

« chaque discours entre en dialogue avec les discours antérieurs… la culture est composée des discours que retient la mémoire collective (…) discours par rapport auquel chaque sujet est obligé de se situer» (p.8).

« l’être humain (…) n’existe qu’en dialogue : au sein de l’être on trouve l’autre. » (p.9).

Todorov en tire les conséquences du point de vue de l’épistémologie des sciences humaines :
« dans les sciences humaines (…) surgissent les problèmes spécifiques de l’établissement, de la transmission et de l’interprétation des discours d’autrui » (p.29).

« contraint de parler ici du discours, mais aussi d’en parler avec le discours, afin d’en saisir le sens idéologique, accessible seulement à une compréhension dialogique, qui inclut l’évaluation et la réponse ». (p.29).

« l’objet des sciences humaines est un texte, au sens large de matière signifiante »
« l’objet des sciences humaines (…) c’est l’homme en tant qu’il est producteur des texte
s »
« l’homme dans sa spécificité s’exprime toujours (parle) c’est à dire crée un texte » (p. 31-32).

« Les sciences exactes sont une forme monologique du savoir : l’intellect contemple une chose et parle d’elle. Il n’y a ici qu’un seul sujet, le sujet connaissant (contemplant) et parlant (énonçant). Seule une chose sans voix se trouve en face de lui. Mais on ne peut percevoir et étudier le sujet en tant que tel comme s’il était une chose, puisqu’il ne peut rester sujet s’il est sans voix ; par conséquent sa connaissance ne peut être que dialogique » (p. 33-34).

« Mon rapport au structuralisme. Contre l’enfermement dans le texte (…) une formalisation et une dépersonnalisation conséquentes : tous les rapports ont un caractère logique (…) Alors que moi j’entends partout des voix et des rapports dialogiques entre elles
» (p. 38).

« L’énoncé qui décrit un autre énoncé entre avec lui dans une relation dialogique » (p. 40).

Cela conduit Todorov à formuler les grandes options de Bakhtine et à définir les bases de son anthropologie philosophique.
« Le sens (la communication) implique la communauté. Concrètement, on s’adresse toujours à quelqu’un, et ce quelqu’un n’assume pas un rôle purement passif (…) : l’interlocuteur participe à la formation du sens de l’énoncé, tout comme le font les autres éléments, également sociaux, du contexte d’énonciation* » (p. 50).

« Aucun énoncé en général ne peut être attribué au seul locuteur : il est le produit de l’interaction des interlocuteurs et, plus largement, le produit de toute cette situation sociale complexe dans laquelle il a surgi. » (p. 50).

« poser l’intersubjectivité comme logiquement antérieure à la subjectivité »
(p. 51).

(Sur ce point voir la note 1 page 52 qui cite notamment G. H. Mead et M. Buber).

« Il est impossible de concevoir l’être en dehors des rapports qui le lient à l’autre » (p. 145).

« Tout ce qui me touche vient à ma conscience – à commencer par mon nom – depuis le monde extérieur, en passant par la bouche des autres (de la mère, etc.) avec leur intonation, leur tonalité émotionnelle et leurs valeurs. Initialement, je ne prends conscience de moi qu’à travers les autres : c’est d’eux que je reçois les mots, les formes, la tonalité qui forment ma première image de moi-même » (p. 148).

« être signifie être pour autrui et, à travers lui, pour soi » (p. 148).
« je ne puis devenir moi-même sans autrui » (p. 148).

« La vie est dialogique de par sa nature. Vivre signifie participer à un dialogue, interroger, écouter, répondre, être en accord, etc. » (p. 149).

« A la limite, le monologisme nie l’existence en dehors de soi d’une autre conscience, ayant mêmes droits et pouvant répondre sur un pied d’égalité, un autre je égal (tu). Dans l’approche monologique (sous sa forme extrême ou pure), autrui reste entièrement et uniquement objet de la conscience, et ne peut former une conscience autre. (…) Le monologue est accompli et sourd à la réponse d’autrui, ne l’attend pas et ne lui reconnaît pas de force décisive. Le monologue se passe d’autrui, c’est pourquoi, dans une certaine mesure, il objective toute la réalité
» (p. 165).

« il ne suffit pas de comprendre le texte comme le faisait son auteur (…) L’auteur est toujours en partie inconscient à l’égard de son œuvre, et le sujet de la compréhension a pour devoir d’enrichir le sens du texte ; il est également créateur. »(p. 168).
« La compréhension n’est donc pas envisagée uniquement comme un processus interpersonnel, mais aussi comme une relation entre deux cultures. » (p. 168).

« La compréhension créatrice ne renonce pas à soi, à sa place dans le temps, à sa culture et n’oublie rien. La grande affaire de la compréhension, c’est l’exotopie de celui qui comprend – dans le temps, dans l’espace, dans la culture – par rapport à ce qu’il veut comprendre créativement (…) Ce n’est qu’aux yeux d’une culture autre que la culture étrangère se révèle de façon plus complète et plus profonde (mais jamais de façon exhaustive…) » (p. 169).

Sur plusieurs de ces questions, voir aussi R. Ghiglione : L'homme communiquant, A. Colin, 1986 ; et L. Vygotski : Pensée et langage, La Dispute, 1997.


* Je laisse de côté la polémique sur les livres signés par Volochinov ou Medvedev, que certains attribuent, peut-être à tort à Bakhtine. Dans le chapitre 1. Biographie, Todorov considère que Bakhtine est au moins co-auteur de ces livres, ce que contestent J.P. Bronckart et C. Bota dans leur livre "Bakhtine démasqué" (Droz, 2011)





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