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Jacques Derrida (1930-2004)



Extraits de : Sur parole. Instantanés philosophiques. Éditions de l’Aube. 2005.

(Transcription des enregistrements de l’émission « à voix nue » sur France Culture, entretiens avec Catherine Paoletti, décembre 1998)

p. 24 Pouvoir tout dire au titre de la fiction, voire du fantasme, c’est marquer que l’institution littéraire (…) la littérature au sens strict est une institution indissociable du principe démocratique, c’est-à-dire de la liberté de parler, de dire ou de ne pas dire ce qu’on veut dire.

p. 25 Je crois qu’il y a dans la littérature le risque de l’irresponsabilité en effet, ou bien de la non-signature (je dis n’importe quoi puisque ce n’est pas moi) ou bien le risque de confondre l’éthique et l’esthétique (…)

p.26 … et la dépossession… Si philosophie il y a, en tout cas comme désir de lucidité et de vérité, elle consiste à prendre acte de cette tragédie, de cette nécessité qui est une menace mais aussi une chance, parce que c’est la chance de parler. I je voulais échapper à ce risque à tout prix, je ne dirais plus rien.

p. 32 … l’Université… Je ne voulais pas appartenir à ces institutions sur le mode du consentement passif, sans remise en cause (…) j’ai été amené à mettre en cause un certain nombre de normes institutionnelles, non seulement dans la pratique quotidienne, mais dans l’écriture, l’enseignement, la forme des questions posées, dans ce que j’écrivais enfin. Ce n’est pas moi personnellement ou la couleur de mes yeux qu’on ne voulait pas, c’est bien ce que j’écrivais.

p. 33- 34 Il est probable que, au-delà même du contenu, les codes, les normes d’écriture ou de langage que j’ai cru devoir proposer paraissaient plus menaçants que le contenu même. Les manières de formuler les questions, de parler, de s’adresser à l’autre, de faire des phrases, de croiser des références, la rhétorique ou le geste d’écrire on été probablement jugées plus redoutables encore que le contenu même. Je crois que quand quelqu’un propose un contenu « révolutionnaire », dans le code courant de la rhétorique, sans remettre en question les normes institutionnelles, l’<université ou ls institutions en général l’acceptent plus facilement que quand quelqu’un change la mise en scène, ou s’interroge sur la scène même, sur l’organisation des protocoles, des procédures, des évaluations, des hiérarchies, etc. (…) il s’agissait effectivement de changer certaines choses.

p.35 Dans les années 70-80, nous avons mis en chantier des travaux de recherche philosophiques et théoriques sur l’histoire de l’enseignement en France, sur les axiomes, les présupposés, les préjugés quelquefois qui fondaient l’organisation et les institutions de cet enseignement.
p. 36 Le Collège International de Philosophie… Le souci était d’ouvrir un espace à des objets qui n’étaient pas encore légitimes dans les institutions universitaires…

p.44 La concentration du pouvoir économique qui commande les médias, les télécommunications, l’informatisation, est en effet un danger pour la démocratie, mais elle peut être en même temps un chance pour la démocratisation. Comment répondre au danger sans annuler la chance ? (…) je crois qu’il faut résister en inventant une forme de résistance qui ne soit pas réactionnaire ou réactionnelle. Par exemple il ne faut pas s’en prendre seulement à la technologie, aux télécommunications, à la télévision de façon massive, homogène et unilatérale, sans savoir que ces machines peuvent également servir la démocratie.

p. 46 Ce qui se prépare à un rythme incalculable, de façon à la fois très lente et très rapide, c’est un nouvel homme bien sûr, un nouveau corps de l’homme, un nouveau rapport du corps de l’homme aux machines. On aperçoit déjà cette transformation.

p. 46-47 Je suis attaché aux formes existantes ou héritées de la condition humaine, du corps de l’homme, de ce qui lui est proche, de son rapport au politique, aux signes, au livre, au vivant, et en même temps je ne veux pas dire non à tout ce qui vient de l’avenir. Qu’il s’agisse du vivant, des prothèses, des greffes, du génome, de toute l’aventure génétique, ou qu’il s’agisse de la technique (…) des médias qui transforment profondément l’espace public et politique.
p. 49 Quand on écrit, quand on enseigne, quand on parle, on propose un nouveau repérage, un nouveau contrat, une nouvelle interprétation à d’autres et puis voilà. C’est à l’autre d’y répondre ou non.

Émission « Staccato », décembre 1997 : De l’hospitalité.

P. 65 … il ne peut y avoir d’amitié, d’hospitalité ou de justice que là où l’altérité de l’autre, comme altérité infinie encore une fois, absolue, irréductible, est prise en compte, bien qu’elle soit incalculable. Lévinas rappelle que le langage, c’est-à-dire l’adresse à l’autre, est dans son essence amitié, hospitalité.

p. 67 Pour Lévinas, la notion de respect, avant d’être un commandement, décrit la situation de distance infinie dont nous parlions ; le respect, c’est le regard, le regard à distance. Et comme vous le savez, Lévinas redéfinit la personne, le moi et l’autre comme des visages. Ce qu’il appelle le visage, à la fois dans la tradition judaïque et selon une nouvelle terminologie, a droit au respect. Dès que suis en rapport avec le visage d’autrui, dès que je parle à autrui, dès que j’écoute autrui, la dimension du respect est ouverte.
… pour lui la paix est première, comme l’hospitalité et l’amitié, c’est la structure même du langage humain.

Émission « Staccato », janvier 1999 : Du mensonge en politique .
( entretien avec Antoine Spire)


  • p.99 (Pour Lacan) seul un être parlant peut mentir, un être en rapport avec la Vérité. (…) Seul peut mentir quelqu’un qui promet la vérité. Or on ne peut promettre la vérité qu’à l’autre.

p. 101 Dès que j’ouvre la bouche, je promets implicitement à l’autre de dire la vérité. C’est d’ailleurs l’existence de cette promesse implicite et performative de dire le vrai, de dire ce que je pense en tout cas, qui rend le mensonge possible. (…) Quand on ment (…) on trahit l’essence et la finalité même du langage qui sont la promesse de la vérité ; et par conséquent, d’une certaine façon, on ne parle pas, on manque à la parole.






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