Daniele Lorenzini : le pouvoir des mots

Le problème de la force du vrai est bien entendu étroitement lié à celui de la force ou du pouvoir des mots, c’est à dire de l’efficacité du langage, de la  capacité qu’a le langage de « faire » quelque chose (ou, comme l’écrit Oswald Ducrot, de transformer la réalité). Poser ce problème à propos de la parrésia conduit pourtant à mettre en question la thèse selon laquelle l’efficacité du langage n’est fondée que sur l’accomplissement d’une certaine procédure conventionnelle ou institutionnelle – la thèse, en d’autres termes, selon laquelle pour produire des effets sur le réel, le langage est toujours obligé de reproduire des normes déjà établies. L’étude de l’énoncé parrésiastique [...] témoigne au contraire de la capacité qu’ont les mots – dans certaines circonstances et sous certaines conditions – de subvertir les normes instituées et de transformer donc la réalité de manière non prévue et non prévisible à l’avance.

Daniele Lorenzini : La force du vrai.De Foucault à Austin, Le bord de l’eau, 2017, pp. 13-14