W. Benjamin : l’université, le langage et l’esprit

Il s’agissait alors d’assurer l’autonomie d’une université aliénée par l’Etat, la famille ou la profession, en l’accordant à sa finalité interne, à l’esprit. Ceci suppose que l’esprit n’obéisse lui-même  qu’à sa propre loi, le langage, auquel, dès ses premiers travaux Benjamin l’identifie.

Philippe Ivernel « Walter Benjamin Critique en temps de crise » Klincksieck, 2022 (p. 44).

Récit du Grand Lustucru

Citation

Spontanément, on a commencé à désigner les forces contraires, les formes hétéroclites, les sensations mêlées qui accompagnaient une balade comme « quelque chose de Grand Lustucru », « c’est assez Lustucru ça ». Formules impossibles à définir en général, mais ressenties et exprimées dans un moment qui pouvait se prolonger en d’autres, et recouper des observations plus larges.

Julien Martin Varnat, Explorations urbaines. Analyse et récits du Grand Lustucru, Editions du commun, 2021.

 

Chamoiseau Ecrire en « état poétique »

L’Ecrire en état poétique, ce n’est point partir de la langue mais partir du plus loin possible de la langue, pour ensuite revenir au plus profond (bouleversé) de la langue. Cela évite d’instituer la langue en fétiche ou en absolu. Cela permet de forcer la langue à accueillir l’entour, les autres langues, le vivant, le monde, l’inouï extensible du cosmos.

Patrick Chamoiseau Ecrire en « état poétique », dans Le conteur, la nuit et le panier, Seuil, 2021, 107.

 

Walter Benjamin la défaite des politiciens

 

« A l’heure où gisent à terre les politiciens en qui les adversaires du fascisme avaient mis leur espoir, à l’heure où ils aggravent encore leur défaite en trahissant leur propre cause, nous voudrions libérer l’enfant du siècle des filets dans lesquels ils l’ont entortillé. Le point de départ est que la foi aveugle de ces politiciens dans le progrès, leur confiance dans « le soutien massif de la base » et, finalement, leur adaptation servile à un appareil politique incontrôlable n’étaient que trois aspects d’une même réalité. »

 

Walter Benjamin Sur le concept d’histoire, Oeuvres III, traduction Maurice de Gandillac, Rainer Rochlitz et Pierre Rusch, Gallimard, Folio essais (p.435)

 

Peronne ne sait tout… (Pierre Lévy)

Personne ne sait tout, tout le monde sait quelque chose, tout le savoir est dans l’humanité. Il n’est nul réservoir de connaissance transcendant et le savoir n’est autre chose que ce que savent les gens.

Pierre Lévy L’intelligence collective. Pour une anthropologie du cyberespace. La Découverte, 1994.

 

 

 

 

être des « cas » … parlés par d’autres ?

Il est stérile et dangereux de penser sa situation particulière sur un mode psychologique, d’aller chercher les réponses en soi, dans son cursus d’expériences personnelles, alors que bien souvent, nos régimes de vie, nos conditions sociales, nos ressentis ne sont que les manifestations localisées et particulières de processus et de phénomènes bien plus larges dans lesquels nous baignons sans vraiment nous en rendre compte. Il ne faut pas se condamner à la solitude péremptoire d’être des « cas ». (…)

Nous sommes les seuls à pouvoir analyser proprement les situations que nous traversons, à prendre des mesures d’action sur nos vies. Nous devons devenir nos propres prescripteurs. Nous ne pouvons plus abandonner nos choix et nos actes aux savants et aux experts, aux médecins, aux sociologues, aux économistes, aux ingénieurs, aux techniciens politiques qui s’improvisent en penseurs privilégiés de nos quotidiens et qui prétendent pouvoir comprendre à notre place. (…)

Nous ne sommes les propriétaires que de nos propres mots. Sans un langage qui soit le nôtre, nous sommes condamnés à être parlés par d’autres.

http://autographie.org/blog/2015/03/15/des-mesures-techniques-disolation-aux-strategies-politiques-du-contact-plaidoyer-pour-une-auto-graphie-sociale-2/

Bernard Lubat et les politiques d’Uzeste

A un moment de mon parcours, j’ai pensé que ma place, celle à partir de laquelle je pouvais apporter quelque chose à la dynamique d’émancipation, était nécessairement liée à cette position rurale minoritaire (Lubat 2015).

Aussi, son idée fut de faire d’Uzeste un lieu au sens où l’entend Edouard Glissant, i.e. un espace de questionnement tant esthétique que politique, ouvert sur le Tout-Monde.

Nous essayons de montrer qu’une vie n’est bien remplie que si l’on comprend qu’il faut toute une vie durant s’y apprendre, s’y cultiver, s’y interroger, s’y instruire, s’y critiquer, s’y inventer sans cesse de la naissance à la mort. (Lubat 2015).

Fabien Granjon, Notes liminaires, dans J. Denouël et F. Granjon Politiques d’Uzeste. Critique en étendue. Tome 2, éditions du commun, 2019.

la pensée se coule dans les mots

La langue permet de saisir la culture d’une population  à un moment donné, car la pensée se coule dans les mots, or les saisies du monde qui s’opèrent à travers chaque langue ne se ressemblent pas. « Le langage reproduit le monde, mais en le soumettant à son organisation propre. » (Benveniste, E. Problèmes de linguistique générale, tome 1. Gallimard, 1966, p. 25). La confrontation des langues est donc instructive, non seulement pour connaître le passé, mais aussi pour mieux comprendre des catégories de pensée dont on continue à se servir chaque jour…

Todorov, T. Lire, écouter, voir. Robert Laffont, 2018, (p. 398)

John Holloway : le temps de l’horloge est en crise

« La crise permanente du temps de l’horloge ne se limite pas au lieu de travail. Nos vies, nos passions, la façon dont nous sommes en relation avec nos amis, tout est lié au temps vivant, au temps du faire, à la lutte quotidienne, silencieuse pour parvenir à d’autres façons de vivre, à d’autres façons de faire et d’entrer en relation. »

John Holloway : Crack capitalism, 33 thèses contre le capital, Libertalia, 2016, p. 370