déposez sur la table votre métaphysique

Sur le site de son éditeur (www.lyber-eclat.net/lyber/korzybski/), on trouve dans un « glossaire » des termes clés de la pensée d’Alfred Korzybski une série de citations de son ouvrage « Science and Sanity : An Introduction to Non-aristotelian Systems and General Semantics (1933), par exemple, l’entrée suivante :

« Termes non-définis [undefined terms] :

a) Nous demandons d’abord quelle est la ‘signification’ de chaque mot prononcé, en nous satisfaisant de définitions approximatives; puis nous demandons la ‘signification’ de chaque mot employé dans les définitions, et nous poursuivons le processus pendant 10 à 15 minutes, pas davantage, jusqu’à ce que la victime commence à tourner en rond – par exemple en définissant «espace» par «longueur» et «longueur» par «espace». À ce stade, nous sommes d’habitude en présence des termes non-définis propres à cette personne. (p. 21)

b) Nous voyons que la structure de n’importe quel langage, (…) est telle qu’il nous faut commencer implicitement ou explicitement par des termes non-définis. (p. 152)

c) Dans la littérature scientifique d’autrefois, on avait l’habitude de demander «définissez vos termes». Le nouveau modèle de la science en 1933 devrait réellement être «énoncez vos termes non-définis». Autrement dit, «déposez sur la table votre métaphysique, (…) et ne commencez qu’alors à définir vos termes à l’aide de ces termes non-définis». (p. 155) »

Il me semble que l’on pourrait appliquer la même proposition à la littérature : à l’origine, au fondement, à la source de l’engagement dans l’écriture, n’y aurait-il pas un petit nombre de « termes non-définis » ? Je me demande même si ce qui structure la psychè  – l’expression est bien lourde, mais je n’en trouve pas d’autre qui évite « esprit » ou « âme » – de chacun d’entre nous, écrivant ou pas, ne serait pas quelque mot non-défini ou question sans réponse.